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Les musardises de Parisianne

Xavier-Marie Garcette, La Vierge noire et le voyou

30 Janvier 2023, 18:00pm

Publié par Parisianne

Xavier-Marie Garcette, La Vierge noire et le voyou

Il y a 60 ans aujourd'hui, le 30 janvier 1963, disparaissait Francis Poulenc, né en 1899.

Hasard du calendrier, enfin pour moi puisque le livre sort ce lundi en librairie, je termine ce jour  La Vierge noire et le voyou, Une brève histoire de Francis Poulenc, de Xavier-Marie Garcette

J'avais très brièvement évoqué Poulenc dans ma chronique du Groupe de Six de Pierre Brevignon, un livre passionnant, mais je vous l'accorde un peu ardu. 

Comme tout le monde, je connais Poulenc par le Dialogue des Carmélites, Les Mariés de la Tour Eiffel, Babar ou encore quelques poèmes d'Eluard, Apollinaire, Desnos, ou Radiguet mis en musique, mais ce n'est pas connaître, je l'ai vite compris en lisant cet  ouvrage. J'avais un léger a priori, je crois. sa musique ne me semble pas toujours très accessible et trop aux portes de la modernité parfois. 

C'est donc avec curiosité que je me suis plongée dans la biographie romancée de Xavier-Marie Garcette, que je dois d'abord remercier pour notre sympathique entretien grâce à Média Livres. J'étais désolée de jouer les mauvaises élèves, je n'avais pas eu le temps de lire le livre, et je ne suis pas la plus habile aux entretiens impromptus, ni aux entretiens tout court, d'ailleurs, il faut bien le reconnaître ! 

Certains critiques semblent ne pas admettre que Poulenc, qui depuis 1936 compose des œuvres religieuses admirables, et vient ainsi renouveler de façon marquante le répertoire de la musique chorale, ait pu se laisser aller à composer cette musique pourtant charmante mais qui sent un peu le voyou justement, avec quelques clins d'œil à des thèmes populaires ou jazzy dans le troisième mouvement.

Peut-être aurez-vous pris le temps d'écouter, au moins partiellement, ce Concerto pour piano mal jugé à sa présentation en 1950, et qui vaudra au critique Claude Rostand, cette petite phrase mainte fois reprise.

Il y a deux personnes chez Poulenc : il y a, si j'ose dire, du moine et du voyou.

Claude Rostant cité par XM Garcette

Avec beaucoup d'habileté, Xavier-Marie Garcette nous offre de suivre Francis Poulenc en nous présentant ses deux facettes d'ange et de démon, et c'est passionnant.

Dans un style agréable, l'auteur nous conduit de Paris au Quercy en passant par la Touraine, il nous ouvre les portes des salons, des salles de concert et fait revivre une époque riche d'autant de drames que de créations. C'est agréable, curieux, enlevé et surtout bien sûr, musical !

Comment lire un tel livre sans se plonger dans l'écoute. Lors de notre rencontre, j'ai demandé à l'auteur si une pièce en particulier avait guidé sa main, mais non, c'est l'œuvre tout entier qui est au cœur de ce récit, l'œuvre d'un homme traversé par ses passions et ses doutes, ses élans de l'âme et du cœur. Un homme qui vit difficilement son homosexualité qui lui semble parfois en totale contradiction avec sa foi née d'une rencontre avec la Vierge Noire de Rocamadour, mais un homme qui vit dans l'effervescence artistique, intellectuelle et engagée de son temps.

J'ai été très sensible au découpage du livre par référence aux différentes créations de Poulenc, à commencer par Les Biches (impossible de ne pas penser à la toile de Marie Laurencin), en 1924, jusqu'au Dialogue des Carmélites, d'après le texte de Bernanos, en 1957.

Poulenc déteste les tendances qui commencent à poindre : atonalité, dodécaphonisme, musique sérielle, rien de tout cela ne trouvera jamais grâce à ses yeux. Il est et demeurera jusqu'à la fin de sa vie un mélodiste.

Vous l'aurez compris, un livre qui m'a totalement séduite, brisant mes préjugés en me forçant à écouter plus attentivement et surtout à découvrir vraiment le travail de Francis Poulenc.

J'aime particulièrement ce type d'ouvrage qui convie l'histoire de l'art à la table des lettres, avec La Vierge noire et le voyou, Une brève histoire de Francis Poulenc sous la plume de Xavier-Marie Garcette, j'ai eu un festin de reine !

Suivre Francis Poulenc et croiser Georges Auric, Max Jacob, Cocteau, Eluard, Ginette Neveu et tant d'autres, c'est traverser une époque foisonnante et c'est un réel bonheur. 

Alors, je n'ai qu'un mot à dire, foncez chez votre libraire, même si la musique de Poulenc ne vous parle spontanément pas, je suis certaine que vous vous laisserez entraîner.

Je ne résiste pas à la tentation de vous partager ce montage dédié à Jean Périsson qui me manque tant.

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Dessinez-moi Paris !

29 Janvier 2023, 18:26pm

Publié par Parisianne

© Anne Lurois-Delassise

© Anne Lurois-Delassise

Dessinez-moi Paris !

Une tour éphémère qui bravera le temps,
des rues interminables, des jardins enchantés,
Un fleuve à robe longue, pour les oiseaux des nuits.

Dessinez-moi Paris mais de grâce mon ami,
Mouillez votre pinceau aux couleurs d’arc en ciel,
Faites-moi la ville belle et la vie souriante.

Éclairez-moi Paris et dessinez nos jours !

© Anne Lurois-Delassise

© Anne Lurois-Delassise
© Anne Lurois-Delassise

© Anne Lurois-Delassise

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Ariane Bois, Ce pays que l'on appelle vivre

28 Janvier 2023, 10:00am

Publié par Parisianne

Ariane Bois, Ce pays que l'on appelle vivre

A l'occasion d'une rencontre Babelio Plon, j'ai eu le plaisir de découvrir Ariane Bois, journaliste et romancière que je ne connaissais pas, au cours d'un échange très sympathique.

Ce Pays qu'on appelle vivre a pour cadre le camps des Milles, ce camp, situé en zone libre, non loin d’Aix en Provence, dont on parle finalement assez peu, dans lequel ont été envoyés les Allemands et étrangers ayant fui le régime nazi, juifs, tziganes, engagés dans les combats politiques contre le fascisme, tous les condamnés de la barbarie.

Beaucoup d'artistes, considérés comme dégénérés sont venus se réfugier en zone libre, certains ont pu quitter la France pour les Etats-Unis ou d'autres pays outre-mer qui, pendant un temps, ouvraient leurs frontières.

D'autres, connus ou inconnus, ont été livrés comme beaucoup d'anonymes, hommes, femmes et enfants, à l'enfer des camps.

Le camp avale les hommes, en commençant par leur esprit, et recrache des êtres brisés, à la limite de la folie.

Ariane Bois fait du camp un personnage à part entière de son roman, c'est en grande partie là que se déroule l'action sur fond de noirceur malgré le rouge des tuiles fabriquées sur place avant guerre ; par opposition, Marseille, non loin, joue le rôle de la lumière, de l'espoir, puisque les prisonniers sont parfois autorisés à s'y rendre pour tenter d'obtenir un visa vers un avenir meilleur, et c'est à Marseille que le principal protagoniste Léo, rencontrera Margot, son soleil, son grand amour.

Mais c'est également à Marseille que sont retenues les femmes et les enfants, pour lesquels Margot se bat, afin de leur procurer le minimum de confort dans des foyers de fortune, hôtels ou immeubles réquisitionnés. Séparées de leurs époux et vivant dans des conditions difficiles, elles sont la garantie que les hommes ne chercheront pas à fuir.

Les hommes eux, sont donc aux Milles, ce camp de transit qui reçoit les ennemis du Reich en attente d'un départ. Vous aurez peut-être en mémoire l'épisode du train des Milles, mis sur le devant de la scène par un film avec Jean-Pierre Marielle, je vous mets un cours extrait.

Comme dans de nombreux camps, certains acteurs de ce terrible épisode (gardiens pasteurs, curés ou simples civils), se sont battus au péril de leur vie pour sauver ces hommes, ces femmes et ces enfants livrés en masse à l'Allemagne nazie en 1942. On dénombre plusieurs Justes, certains cités par Ariane Bois dans son roman.

[...] toutes les silhouettes se ressemblent, comme s'il s'agissait du même homme multiplié à l'infini. Le camp détruit ainsi toute individualité, toute velléité de se démarquer des autres. On fait partie d'un troupeau, celui des internés.

Le parti pris de l'auteur d'écrire un roman, et la fluidité de son écriture, rendent la lecture aisée, et si quelques invraisemblances - mais n'est-ce pas là tout le charme du roman ? - ponctuent le texte, elles n'enlèvent rien à l'intérêt historique. Ariane Bois maîtrise parfaitement son sujet, elle mêle habilement fiction et réalité pour nous dépeindre des situations dramatiques, de vains espoirs, et la force de l'art pour tenir face à l'horreur.

Léonard Stein, caricaturiste de presse juif allemand n'a de cesse de s'échapper, et devant son impossibilité de fuir, il s'évade par ses dessins.

L'auteure qui connaît manifestement bien les lieux, évoque la fresque Le Banquet des Nations, dans le réfectoire des gardiens, une partie est l'œuvre du peintre Karl Bodek, qui sera déporté des Milles et mourra à Auschwitz.

Les rapports entre ces hommes certains combattifs d'autres résignés, la difficulté de leur vie difficile mais oisive, est terriblement bien présentée, nous rendant certains protagonistes attachants, d'autres méprisants.

Vous l'aurez compris, un texte riche d'informations qui donne véritablement envie d'approfondir le sujet.

Je vous invite à suivre le lien ci-dessous vers le site du Camp des Milles.

La réputation de Varian Fry s'est vite étendue. Ce journaliste de gauche avait été missionné dès l'été 40 par l'American Emergency Comittee pour permettre à des intellectuels, des écrivains, des artistes en danger dans le sud de la France de rallier les Etats-Unis grâce à un visa d'urgence. Eleanor Roosevelt elle-même, la femme du Président, courageuse dans sa lutte contre le racisme et le fascisme, militante des droits des noirs et des droits des femmes, l'aide dans ses démarches.
Varian Fry a déjà secouru l'écrivain André Breton, le peintre André Masson, Konrad Heiden, le biographe de Hitler, dont le dictateur veut la peau, le prix Nobel de physiologie Otto Meyerhof, et l'immense Marc Chagall, ou encore Hannah Arendt. De manière légale lais aussi clandestine...

Un autre personnage, bien réel celui-là aussi, apparaît dans le roman d'Ariane Bois, il s'agit de Varian Fry, ce journaliste américain qui en 1935 à Berlin, est témoin de la maltraitance d'un vieil homme juif roué de coups dans la rue. Outré il tente dès son retour d'alerter les puissances étrangères et l'opinion publique sur les dangers imminents que représente Hitler. Il aura du mal à se faire entendre mais finira par arriver en France avec une liste de nom de personnalités à sauver.

Très honnêtement, j'ai découvert il y a peu l'existence de Varian Fry à l'occasion d'une conférence à la Fondation Giacometti sur les artistes de Montparnasse dans les années 1940. L'homme m'a immédiatement intéressée. Et j'ai fait quelques recherches. Il y a plusieurs livres, je n'ai pas encore trouvé celui qui pourrait m'éclairer, mais vous pouvez visualiser sans peine quelques vidéos sur le net, notamment une visite virtuelle de la Villa Bel Air, qui a abrité André Breton, son épouse et sa fille, ainsi que Max Ernst, entre autres.

Varian Fry dont le Centre Américain deSsecours de Marseille dérange les autorités françaises et inquiète les autorités américaines sera renvoyé aux Etats-Unis. Il n'aura de cesse d'interpeller le monde pour tenter de sauver les hommes de la barbarie.

Que dire de plus ? Il y aurait beaucoup de choses à évoquer encore. Le rôle des femmes, leur combativité, leur force, la bonté des uns face à la cruauté des autres, des thèmes qui restent tristement d'actualité en somme. J'aurais également pu vous raconter un peu l'histoire entre Léo et Margot, leur lutte commune pour la liberté et les enfants mais est-ce bien utile de vous raconter ?

Alors, il me reste simplement à vous inviter à lire ce beau roman plein d'humanité, ce roman riche d'enseignements sur un pan très sombre de notre histoire, pour ne jamais oublier.

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Les Mots dans les yeux

25 Janvier 2023, 17:13pm

Publié par Parisianne

©Yves Lacoutière

©Yves Lacoutière

Partir à la venvole*, glisser sur la ligne d’horizons inconnus,
A l’onde des nuages, faire courir ton regard au fil de tous les beaux
Pour saisir en passant des images impromptues.
Il est venu le temps de te laisser porter par un souffle nouveau !

Elle a sonné enfin l'heure de la liberté,
Des pendules oubliées, des journées sans soucis, 
Te voilà, aujourd’hui, des contraintes affranchi,
Pour, à ton art tout entier, pouvoir te consacrer !

© Anne Lurois-Delassise

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Les Mots dans les yeux

18 Janvier 2023, 18:00pm

Publié par Parisianne

©Yves Lacoutière

©Yves Lacoutière

Vouloir toucher le ciel à en perdre la tête, 
S’immerger dans l’écume des nuages
Si haut, toujours plus haut, jusqu’au vertige, 
Tutoyer le soleil, et s’y brûler les ailes.
 
Anne Lurois-Delassise

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Michel Pastoureau, Dominique Simonet, Le Petit livre des couleurs

14 Janvier 2023, 10:00am

Publié par Parisianne

Michel Pastoureau, Dominique Simonet, Le Petit livre des couleurs

Michel Pastoureau, historien, anthropologue, se prête dans ce petit recueil au jeu des questions posées par l'écrivain Dominique Simonet et c'est un plaisir à consommer sans modération surtout quand il fait gris !

A force de les avoir sous les yeux, on finit par ne plus les voir. En somme, on ne les prends pas au sérieux. Erreur ! Les couleurs ne sont pas anodines...

Comment résister à une telle introduction ! J'écoutais dernièrement un petit reportage qui disait que nous avions fait disparaître les couleurs, que nous étions presque uniformément en noir, gris ou jean, que nos murs étaient tous blancs etc. Ce qui n'est pas totalement faux.

Les couleurs sont pourtant partie intégrante de nos vies et dans cet essai dont vous aurez sûrement entendu parler, Michel Pastoureau nous explique leurs origines, leurs rôles à travers l'histoire, leur évolution.

C'est passionnant, de lecture facile et légère. On se prend à sourire devant certaines évidences.

Je n'ai qu'un mot à dire, n'hésitez pas, si ce n'est déjà fait, à vous plonger dans ce petit livre joyeux, et dites-nous donc qu'elle est votre couleur préférée ! 

Je fais partie de la catégorie des consensuels, mais j'ai un goût commun avec Michel Pastoureau, et pour le côté élégant, le noir est mon meilleur ami ! Je vous ai donné des pistes là !

 

La leçon que nous tirons ici est réjouissante : une couleur n'existe que parce qu'on la regarde. Elle n'est en somme qu'une pure production de l'homme. A méditer.

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Les Mots dans les yeux

11 Janvier 2023, 18:00pm

Publié par Parisianne

©Yves Lacoutière

©Yves Lacoutière

Dos aux planches inégales, écouter le silence.

Ne saisir que le souffle de la montagne qui s’engouffre dans les bardeaux disjoints, les craquements des branches sous le poids de la neige alourdie par la fonte, et soudain, le sifflement d’une marmotte.

Le printemps est là, la vie renaît et la vieille masure retrouvera bientôt le tintement des clarines, les voix des randonneurs.

Je voudrais rester là, savourer cette pause, sentir sous mes doigts l’herbe brûlée renaissante, respirer la terre.

Respirer le vent.

Anne Lurois-Delassise

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A tables

10 Janvier 2023, 15:13pm

Publié par Parisianne

A tables

Il y a longtemps que nous n’avions pas parlé d’art de la table, pourtant la période des fêtes se prête aux tables joliment dressées. Voici un échantillon de nos tables de Noël et de l’an mais aussi de ce week-end.

J’aime particulièrement mettre à l’honneur les vaisselles des grands-mères, de toutes les grands-mères. Ce qui est amusant, c’est la différence de taille entre les assiettes en fonction des époques. Je devais passer voir une antiquaire de mon quartier pour l’interroger à ce sujet, et lui montrer quelques pièces pour avoir une idée de date, mais je n’ai pas encore eu le temps.

Et quand je peux, agrémenter la table d’une petite composition florale, je ne m’en prive jamais.
 

A tables
A tables
A tables
A tables

Mention spéciale pour la table de Noël dressée par mon papa pour me soulager pendant que j’étais en cuisine, encore épuisée par une attaque d’un virus très à la mode depuis quelques années maintenant !

A tables

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Bernard Chambaz, La Peau du dos

8 Janvier 2023, 18:00pm

Publié par Parisianne

Photo Anne Lurois-Delassise

Photo Anne Lurois-Delassise

Découverte de cet auteur que je ne connaissais pas, romancier, poète, historien, prix Goncourt du premier roman en 1993 pour L'Arbres de vies chez Françoise Bourin, entre autres, je ne les citerai pas tous.

Bernard Chambaz a également participé en 2020 à l'expérience Ma nuit au musée, il a en tiré un livre Ephémère, pour sa nuit passée à côté de Parme, au musée Franco Maria Ricci.

Je ne l'ai pas lu et ne connais pas ce musée, donc n'hésitez pas à apporter en commentaire des informations si vous en avez, et des conseils de lectures d'autres livres de cet auteur aussi !

Pendant quelques secondes, son chiffon entre les mains, Auguste regarda le type assis sur le rebord d'un rocher de l'autre côté de la clairière. Depuis un bon quart d'heure, l'homme n'avait pas bougé, il se retournait régulièrement comme si un sanglier ou Dieu sait quoi pouvait débouler dans son dos et il semblait en proie à des pensées sombres. [...]
Auguste avait d'autres sujets d'intérêts et il ne prêta plus attention à ce type qui avait l'air d'un ouvrier en rupture de ban. Il continua un moment à essayer de peindre la clairière, il chercha une nuance de jaune qui correspondait à cette heure mais il n'y parvint pas. Par réflexe, il observa les confettis de lumière sur les feuilles des hêtres [...]

Vous aurez peut-être deviné avec la référence aux "confettis de lumière" et avec l'Autoportrait de couverture de ce roman, Auguste Renoir (1841-1919) est l'un des deux protagonistes de ce livre. C'est d'ailleurs ce qui m'a attiré quand j'ai lu la page quatre de couverture.

La poésie de l'écriture rend parfaitement la quête de lumière de l'artiste, c'est un des points forts de cet ouvrage à l'écriture très agréable et poétique... trop peut-être !

Nous rencontrons ici un Renoir jeune, pas encore connu et déjà passionné par son art qui fait de lui un observateur de ce qui l'entoure.

Raoul se présenta brièvement. Il arrivait de la gare de Fontainebleau, il avait cheminé, un peu au hasard mais plein sud, et, bien qu'il eut l'habitude de beaucoup marcher, il s'était arrêté là parce qu'il avait mal aux pieds. Malgré sa barbe de prophète, il ne devait pas avoir trente ans et, à ses mains, ce n'était sûrement pas un ouvrier. Auguste comprit encore, à demi-mot, que Raoul ne savait pas où dormir la nuit prochaine, et - aussi - qu'il préférait éviter les pandores.*

Raoul, c'est Raoul Rigault (1846-1871), journaliste et homme politique acteur de la Commune de Paris, fusillé par un sergent versaillais le 24 mai 1871.

Les deux hommes se seraient vraiment rencontrés, les deux anecdotes racontées par l'auteur, rencontre en forêt de Fontainebleau puis à Paris à la préfecture où Renoir a été conduit parce que considéré comme espion à la solde des Versaillais alors qu'il peignait sur les bords de Seine, sont des faits réels. Le reste est belle broderie d'auteur, ce qui ne gâche rien au plaisir.

Les faits se déroulent donc à la fin de la guerre de 1870 et pendant la Commune de Paris, période très agitée et violente que Renoir, qui n'a manifestement jamais cherché à s'engager politiquement, survole alors que Rigault est un acteur.

On évoque la mort tragique de Bazille, grand ami du peintre, on croise quelques figures caractéristiques de l'époque, on entre au Louvre à sa réouverture après la guerre, ... on... 

Et voilà, "on" pour signifier que malgré la beauté indéniable de l'écriture, j'ai eu un sentiment de distance entre l'auteur et ses personnages.

La maîtrise des sujets, art et histoire, est évidente, je vous disais d'ailleurs en démarrant que Bernard Chambaz était poète et historien, mais voilà, je ne suis pas parvenue à m'attacher aux personnages, pas d'émotion pour moi dans ce texte malgré la lumière des tableaux décrits. Et finalement, je l'ai lu presque plus comme un essai que comme un roman. Donc beau texte mais petite déception.

L'avez-vous lu ? Votre avis m'intéresse !

Au carrefour de deux routes, il s'assit sur une vieille table de vénerie, posa sa planche à dessin contre le tronc incliné d'un frêne, fixa une première feuille de papier avec une pince, respira longuement et se lança. Une deuxième, une troisième feuille suivirent, il s'émerveillait qu'un simple coup de crayon fît surgir la lumière, il s'agaçait d'un geste loupé, il recommençait, complètement absorbé parce qui se tramait entre sa feuille de papier et les frondaisons qu'il avait sous les yeux, obéissant à sa main comme si elle était la providence.

Bernard Chambaz, La peau du dos Editions du sous-sol

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Lettre morte

6 Janvier 2023, 18:00pm

Publié par Parisianne

©Anne Lurois-Delassise

©Anne Lurois-Delassise

Le bonheur d’une lettre ne viendra plus déranger l’araignée besogneuse installée en bonne place, dans ce réduit un peu vieillot avec balcon sur rue.

Hélas, de lettres nous ne recevons plus !

Que sont devenues nos attentes, l’espoir d’une missive du bout du monde ou du bas de la rue, un mot doux griffonné, une carte de vœux pour un anniversaire, ou juste une pensée.

Qu’il était doux ce moment où l’on s’emparait de l’enveloppe, attentifs au cachet de la Poste qui disait la provenance, à une écriture à deviner ou savourer, à la beauté d’un timbre.

L’attente. N’était-ce pas le plus beau moment de la correspondance ? Compter les jours jusqu’à la réponse, espérer, préparer les choses à dire aux correspondants les plus réguliers pour ne rien oublier.

Et écrire… laisser le papier absorber la sève des mots, la plume chanter, l’esprit voyager pour un partage d’instants magiques.

Ecrire pour le geste de la main tendue.

Ecrire pour être écouté en silence.

Lire pour deviner une voix lointaine.

©Anne Lurois-Delassise

©Anne Lurois-Delassise

Il est beaucoup question de changements dans les services postaux aujourd'hui. Ce n'est pas surprenant, même le percepteur ne nous écrit plus !

Je suis une nostalgique de l'écriture manuscrite (même si je la pratique moi-même beaucoup moins et toujours avec le stylo de ma grand-mère), mais je suis aussi une nostalgique de la correspondance. Avez-vous beaucoup écrit ?

J'ai eu la chance d'avoir de nombreux correspondants dans mon adolescence, en Allemagne et aux Etats-Unis, pour la pratique des langues, et nous sommes toujours en contact. Même si notre adolescence est un lointain souvenir, les liens tissés avec les mots ne se sont jamais distendus ! L'époque de l'adolescence a également été une période riche de très nombreuses lettres avec mes copines, nous avions beau nous voir tous les jours, il y avait toujours à dire. Puis les mots doux échangés, mais ça c'est top secret !

Plus tard, des partages très riches avec des amies parties comme jeunes filles au pair, des amis partis en coopération pendant leur service militaire, un ami engagé, envoyé sur des zones de conflits à qui j'écrivais chaque semaine et qui me répondait quand il pouvait sur ce qu'il pouvait (j'ai des lettres sur des morceaux de carte d'état major, chut !).

J'ai presque tout gardé, c'est tellement plus agréable de mettre son nez dans ces vieux papiers que dans un répertoire d'ordinateur !

Et vous, quel est votre rapport à la correspondance ?

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