Bien souvent, pour ne pas dire tout le temps, mes publications sont programmées. La raison est simple, quand j'ai du temps pour m'installer devant mon ordinateur, j'engage avec vous une conversation silencieuse pour échanger sur les sujets qui me sont chers.
Mais je manque parfois de temps, et donc je ne réagis pas toujours à vos commentaires, ne visite pas vos blogs et ne publie pas de façon régulière.
Mais vos commentaires sont lus avec toute l'attention qu'ils méritent. C'est la raison de ce post aujourd'hui, écrit avant de rejoindre un de mes grands seniors, en cette fin de semaine marquée par la disparition de l'un d'entre eux, par un moment joyeux avec mon Centenaire préféré, par une visite de l'expo Matisse avec une adorable Vieille Dame un peu égarée et qui me prend la main comme une mère à sa fille pour guider son pas un peu hésitant.
Vous avez été plusieurs à réagir avec beaucoup de gentillesse à ce que je dis de mon activité, et croyez-moi, bien que pour la plupart nous ne nous connaissions pas, vos mots m'ont non seulement beaucoup touchée mais également encouragée.
Non pas que je baisse les bras, mais il faut reconnaître que mon métier, qui pour beaucoup n'en est pas un puisque déjà, il n'a pas de nom, est une activité aussi passionnante qu'épuisante, aussi enthousiasmante que perturbante.
Ô rage ! Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie !
Mais si je réfléchis bien, le plus épuisant dans tout ça, c'est sûrement l'absence de conscience de notre société face à l'utilité des loisirs pour les seniors fragiles et isolés. Nous en discutions dernièrement avec la responsable du réseau Agréâge avec qui je suis en relation de travail depuis de nombreuses années, le loisir n'est pas jugé comme une priorité !
Et pourtant ! Oublier le temps de quelques heures ses douleurs, renouer avec une activité et surtout avoir à ses côtés une oreille attentive autre qu'un soignant ou un membre de sa famille, aide beaucoup à surmonter certaines épreuves.
On me dit encore souvent, que je suis chanceuse d'être payée pour lire ou pour faire les expos du moment... c'est tellement réducteur !
Vous comprendrez alors combien vos messages peuvent être encourageants, je vous en remercie très chaleureusement !
Et je file retrouver Georges, atteint de la maladie d'Alzheimer, qui a une passion pour la poésie et la littérature, et se souvient avoir, "dans une autre vie", adoré la mythologie mais ne plus trop savoir qui a fait quoi. Nous allons réviser ensemble avec cette BD de l'Ecole des Loisirs que je suis allée chercher à son attention, en commençant par Troie.
Et je glisse dans mon sac à main mon inséparable Anthologie de la poésie française de Georges Pompidou, achetée il y a des années sur les conseils de Jean Périsson, chef d'orchestre dont je vous ai déjà parlé, le livre indispensable aux promenades utiles. La maladie d'alzheimer atteint le physique autant que la mémoire, maintenir une activité physique est aussi indispensable, vous pouvez donc voir sur la première photo qu'il faut pouvoir ménager des pauses utiles !
Dans cette Anthologie, j'ai ajouté le Sonnet de Félix Arvers que Georges m'a fait découvrir en me le récitant par cœur ; vous comprenez le bonheur sans limite de ces échanges qui me réservent souvent de belles surprises ?
Un grand senior qui prend son épouse pour sa mère, et qui me dit "comment, vous ne connaissez pas le Sonnet d'Arvers ? " et se lance dans une récitation magnifique !
Un grand senior qui ignore mon prénom, malgré nos rendez-vous hebdomadaires depuis plus de six mois, mais m'accueille en disant à son entourage, " mon amie est là pour que nous travaillons sur la littérature ".
Le temps n'a pas de prise sur les instants de bonheur partagé !